LES CONTI JUGÉS EN APPEL

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SIX CONTI JUGÉS EN APPEL

RÉCIT par Mathieu Schmitt

Six salariés de l’usine Continental de Clairoix, condamnés pour avoir mis à sac la préfecture de Compiègne, ont été jugés, mercredi 13 janvier, par la cour d’appel d’Amiens. Des peines allant de deux à cinq mois de prison avec sursis ont été requises. Une manifestation de soutien a réuni près de 1500 personnes.

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Toujours motivés les Conti. Dans une ambiance bon enfant mais bruyante, près de 1500 personnes ont défilé à Amiens, jeudi 13 janvier en fin de matinée, pour soutenir six salariés de l’usine Continental de Clairoix (Oise), dont le responsable CGT Xavier Mathieu, qui comparaissaient devant la cour d’appel pour la mise à sac d’une partie de la préfecture de Compiègne, le 21 avril 2009. Au cri de «Les voyous, c’est pas nous», les manifestants ont défilé derrière une banderole qui annonçait la couleur: «Relaxe pour nos six camarades – Halte à la répression anti-ouvrière – Défense des libertés publiques.»

Autocollants, blousons et pétards étaient de sortie, sans compter les quelques boules de neige envoyées sur les CRS, pour animer la place faisant face au palais de justice d’Amiens, où les prises de parole se sont succédé avant le début de l’audience. Seules la presse et une soixantaine de personnes soutenant les Conti ont pu assister au procès, le bâtiment ayant été transformé en citadelle assiégée (barrières à l’extérieur, contrôles multiples à l’intérieur et importante présence des forces de l’ordre).

Amiens, mercredi 13 janvier 2010. Les manifestants face au palais de justice.

Amiens, mercredi 13 janvier 2010. Les manifestants face au palais de justice.

De nombreux leaders politiques, allant du PS à Lutte ouvrière, en passant par le NPA, les Verts, le PCF et le Parti de gauche – les élections régionales sont proches -, s’étaient déplacés pour comparaître en tant que témoins de moralité. Plusieurs centaines de salariés de l’usine étaient au rendez-vous. Visiblement ému par tant de soutien, Xavier Mathieu a cependant regretté, «malgré nos invitations toujours renouvelées», l’absence des dirigeants des cinq confédérations syndicales «pourtant toutes représentées chez Continental». Au niveau syndical national, seul Solidaires a appelé à la mobilisation.

Voilà pour l’aspect festif. A l’intérieur du palais de justice, une autre partie commence alors, vers 13h30. Le tribunal revient longuement sur le contexte et les faits qui se sont déroulés à la sous-préfecture de Compiègne, ce 21 avril 2009. Une manifestation des salariés de Continental Clairoix – une parmi les 34 que comptera leur mobilisation –, rassemble près de 400 personnes à Compiègne. A Sarreguemines, d’un moment à l’autre, doit être connu le résultat du référé qu’a intenté l’intersyndicale afin d’obtenir la suspension du plan de 1120 licenciements. Une partie des manifestants investit la sous-préfecture et demande à voir la sous-préfète. Manque de chance, elle est à Beauvais.

Amiens, mercredi 13 janvier 2010. La figure emblématique des Conti, le cégétiste Xavier Mathieu.

Amiens, mercredi 13 janvier 2010. La figure emblématique des Conti, le cégétiste Xavier Mathieu.

Après de nombreux coups de fil, la nouvelle tombe: les Conti sont déboutés, leur demande est rejetée. Coup de colère de Xavier Mathieu, qui balaye l’ordinateur et une imprimante face à lui, sous l’œil des caméras, de TF1 notamment – «Merci TF1!», s’exclamera même le président. La défense souligne que cela ne veut pas dire que le syndicaliste a bel et bien cassé le matériel. Elle insiste alors sur le contexte humain et psychologique de ce moment, après des mois de lutte pour sauver les emplois, et avant l’accord social. «Le top départ de ce qui s’est passé, assure Xavier Mathieu, c’est le rejet de notre demande. […] Ma seule faute, c’est d’avoir dit à l’intérieur de la sous-préfecture qu’on avait perdu, et pas à l’extérieur», remarque-t-il. Et de préciser qu’à sa colère se rajoutait le fait «qu’à cinq reprises, on ait refusé de me passer la sous-préfète» et qu’il n’avait plus aucun contact avec le médiateur du gouvernement. Xavier Mathieu met en cause les personnes qui les
ont identifiés sur les vidéos: «Les quatre « témoins » sont quatre dirigeants de l’entreprise. Comme par hasard, ils [ont identifié] sept personnes du comité de lutte, dont six de la CGT. Ce sont les gens contre qui on se battait à l’époque qui nous ont désignés. C’est incroyable!» Plusieurs dizaines de personnes avaient investi les locaux.

Les autres prévenus se défendent également de toute préméditation et contestent les faits qui leur sont reprochés. Sur les images télés, on voit deux d’entre eux jeter des papiers par la fenêtre. «Quels biens précisément ont été détruits ou dégradés?», interroge alors la défense. Condamnés en première instance à des peines allant de trois à cinq mois de prison avec sursis et à une amende, les six Conti connaîtront le résultat de leur appel le 5 février. L’avocat général a requis des peines allant de de deux à cinq mois de prison avec sursis.

Mathieu Schmitt.

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