ALILOKE #4 : Dans le Grand Ouest Américain
Publié le | par Thibault Pomares
[RADIO] Hello Aliloké ! Pour ce numéro d’été, Yasmine et Thibault vous emmènent en voyage dans le Grand Ouest Américain. En Californie d’abord, côte rebelle, rock’n’roll, décontractée, « laidback » comme on dit là bas; Mais n’en restons pas là… Traçons la route, pied au plancher, allons nous perdre dans l’immensité des grand espaces, des canyons d’Arizona, aux déserts du Nevada, en passant par les réserves navarro en Utah… La route est longue, longue, longue… Entends-tu au loin le son qu’émet l’écorce molle des séquoias ?
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Aliloke : Ailleurs, [ :Aliloké :] – Langue Espéranto.
Le data script de l’épisode
First Stop. San Francisco. Ça monte et ça descend dans cette ville où aujourd’hui encore les vapeurs d’herbe surgissent d’un quartier à un autre, non sans rappeler une certaine époque dont la tremblante city of the bay fut l’épicentre.
Haight/Ashbury street, San Francisco – California
Milieu des années 60 donc, le journaliste frenchie Alain Dister, encore jeune, franchit l’Atlantique et part vivre son summer of love. Son sac à dos, il le pose au croisement de deux rues qui cristallisent encore à travers leurs noms un autre monde fait d’hallucinations.
• LECTURE •
Journal de bord « Oh Hippies Days » carnet américains 1966-1969 – par Alain Dister, aux éditions Fayard.
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Haight/Ashbury street, San Francisco – California
Thibault avait laissé un peu de son coeur à Frisco quand nous roulions en direction du sud sur la sinueuse California 1… Ça, c’était jusqu’à ce que l’on pénètre dans les immenses forêts de redwood à Big Sur, terres côtières angoissantes et brumeuses dont nous parlait l’écrivain Henry Miller lors de sa première télévision. C’était en 1959 dans l’émission Lecture pour tous… L’habitant de ces bois mettait alors des mots sur cet énigmatique « pays »
Henry Miller’s House, Big Sur – California
Passés les fantomatiques silhouettes d’automobiles qui perçaient la brume stagnante aux abords des falaises de Big Sur, nous mettons – après un crochet hollywoodien le cap à l’Est. À rebrousse chemin donc, des pionniers de l’Ouest lointain, prenons la mourante route 66, abîmée, cabossée, se faufilant au cœur des terres californiennes, contournant le cratère d’Amboy et tranchant le brulant désert de Mojave. C’est dans ce coin, perdu au milieu de rien, Yasmine a trouvé du beau. C’est l’heure de son poème, celui de l’Expo.
• REPORTAGE EN POÉSIE : L’EXPO •
Il faut que je vous parle d’un moment fort de notre épopée
Lorsqu’on était en direction de Monument Valley
On voulait prendre un bout de la route 66
Une envie de vérifier que le mythe ne soit pas fictif
On croise des groupes de motards d’un autre âge
Ils doivent probablement la parcourir comme un pèlerinage
Une petite caravane aménagée
Vend du café près d’un motel abandonné
Pour s’éloigner de la foule et des bruits
On s’approche des bungalows où les gens dormaient la nuit.
Murs blancs et bordures bleues
À l’intérieur y pendent des objets mystérieux.
En apparence désaffectés et désordonnés
Ils sont suspendus et alignés
On se demande si c’est pensé ou un hasard
Une création d’un quelconque routard.
Roy’s Café Motel – Route 66, Amboy, California
Klip Klak Klam
Avec le vent, une mélodie s’en émane
Quel apaisement dans ce désordre organisé,
C’est pas possible ça doit être le fruit d’une volonté.
On va vers le bungalow suivant
Et on le trouve tout aussi surprenant
Des poutres peintes et taillées
Comme des totems on les a disposées.
C’est sûr cette fois on a compris
Des artistes sont venus squatter ici.
L’expérience est bénéfique
La rencontre avec l’art comme une surprise magique.
C’est comme ça qu’on aimerait le vivre plus souvent.
Le mystère rend le tout bien émouvant.
Nous ne saurons jamais qui ni comment
Mais c’est sur qu’on s’en souviendra longtemps.
On repart presque rassasiés
On se rappellera de toi, cher Roy’s café.
•UN POÈME NAVAJO •
Après ce long parcours, de plus en plus d’aigles et de vautours… parfois plongeant dans les abysses du Grand Canyon avant de remonter jusqu’aux sommets de Monument Valley. On est dans un film signé Sergio. Changement de fuseau horaire dans ces plateaux, ici on en plein territoire Navajo. Yasmine entame la discute avec un indien, jusqu’à ce que celui dernier lui fasse un cadeau. Un vieux poème Navajo.
Where my kindred dwell,
There I wander
The Red Rock House,
There I wander.
In the house of long life,
There I wander.
In the house of happiness,
There I wander.
In old age traveling,
There I wander.
On the beautiful trail I am,
With it I wander.
Monument Valley – Utah
Où ma famille demeure
C’est ici que je me promène
Dans la maison des Red Rock,
C’est ici que je me promène
Dans la maison de la vie longue,
C’est ici que je me promène
Dans la maison du bonheur,
C’est ici que je me promène
Dans le voyage de fin de vie,
C’est ici que je me promène
Dans le magnifique chemin où je suis,
C’est avec lui que je me promène.
Daybreak is clothed
Daylight Boy is clothed
Mother earth is clothed
Before them, Dawn adorned herself
L’aube s’est vêtue
La lumière du jour s’est vêtue
Mère nature s’est vêtue
Avant eux, l’aurore s’est parée
• ZABRISKI POINT – AUDIO-DESCRIPTION •
Il fallait faire un dernier plein avant de filer par la Vallée de la Mort, mais plus une once de cash. Qu’à cela ne tienne, on est allé se refaire à Vegas. Aussi kitsch que glauque, bienvenue au Wall Disney des grands où les fontaines à eaux du Bellagio font pâle figure face aux cascades de feu de l’hôtel Mirage. Bien qu’aujourd’hui il fasse très beau, une certaine faune s’enferme au casino. De la brochette de mamies, au touriste amoché en passant par l’habitant fauché qui comme nous voudrait bien se refaire une santé, on trouve de tout dans ces lieux enfumés. Novices on met une pièce dans la machine bariolée et, à peine le levier abaissé… Jackpot !
70 bucks dans la poche, la chance du débutant. De quoi repartir vers le désert et même investir dans plusieurs galons d’eau. Prochain arrêt, Zabriski Point. Quand je vous dis qu’on est dans un film…
Zabriskie Point fait partie de ces endroits qu’on n’oubliera jamais, un lieu à voir et à vivre dans la Death Valley. Comme si on avait changé de planète pour un ailleurs encore jamais exploré. Un endroit qui a d’ailleurs souvent servi de lieu de tournage pour les cinéastes souhaitant représenter la vie sur un autre astre. Mais Zabriski Point, c’est aussi le titre et le lieu de tournage du célèbre film du réalisateur italien Michelangelo Antonioni dont la rétrospective a lieu en ce moment à la Cinémathèque de Paris.
Daria, Zabriski Point – Michelangelo Antonioni – California
00 :22 :33 – Les routes sont vides au milieu du désert. Trois ou quatre voitures seulement qui sont si espacées qu’elles ne se voient pas. Une musique entraînante passe à la radio et face à un croisement une fille prend la carte routière pour s’orienter. Yeux verts, robe verte et des cheveux longs comme si elle ne les avait jamais coupés, elle se débarrasse de la carte sur le siège arrière puis redémarre. Les tons de la voiture se fondent dans ceux du paysage et va les rejoindre.
00 :37 :05 – On survole des dunes de sable pour rejoindre la belle Daria au volant. La douce musique a repris et elle croque un fruit à pleines dents comme elle semble le faire avec la vie.
00 :38 :15 – Elle observe un vase en céramique en même temps qu’elle téléphone
« I’m in some Ghost town … I’m looking for a small town that’s called Glenville or Valleyville or smthg like that. .. Tou know the desert, does that ring a bell ? […] It’s a fantastic place for mediation. »
Après avoir raccroché, Daria prend une bière au bar. Un autre client au chapeau de cowboy fume une cigarette en buvant sa bière. En quête d’un endroit pour s’évader, on se dit que la Vallée de la mort est un endroit fantastique pour méditer…
« my friend said it’s a fantastic place for meditation » « what do you do on a mediation ? » « you think about things »
Bad Water, Death Valley, California
ALILOKE !
[radio https://soundcloud.com/laradiolibre/aliloke-4-dans-le-grand-ouest-americain]
Réalisation et textes : Yasmine Tashk & Thibault Pomares.