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Bardarbunga : Petit Précis d’Éruption à l’Islandaise

Publié le | par

Thibault, notre amoureux de l’Islande, avait interviewé un pro des volcans à Reykjavik lors de son dernier voyage en terre de glace… c’était en 2011, au lendemain de la crise financière et de deux éruptions qui avaient à l’époque bien perturbé le trafic aérien Européen. Aujourd’hui, rebelote ! C’est au tour du Volcan « Bardarbunga » de faire parler de lui. L’occasion de sortir de nos cartons cette interview inédite qui colle à l’actualité brulante de l’île.

Emmanuel Pagneux est un expatrié Français qui travaille comme géographe spécialisé dans les risques naturels à l’Office Météorologique Islandais de Reykjavík. Autrement dit, les volcans, il connait bien ! Alors que Thibault et Julien faisaient le tour de l’île en 2011 dans le cadre de la réalisation de leur film « Islande : Takk la Crise ? », ils avaient fait un crochet plein de curiosité à l’Office Météo pour rencontrer Emmanuel, ce spécialiste du monde volcanique. Alors qu’un nouveau volcan islandais, le « Bardarbunga », est entré en éruption la semaine dernière, c’est l’occasion de comprendre ici les risques qu’engendre une éruption en Islande ainsi que les répercussions possibles jusqu’en Europe. Le tout enrobé par les jolies images de Julien.

Ça gronde en terre islandaise, et ça risque de continuer.

Alors qu’en 2010 l’éruption de l’imprononçable Eyjafjallajokull avait provoqué l’annulation des vols en plein festival de Cannes, un nouveau volcan au nom tout aussi original fait chauffer le glacier islandais du Vatnajökull.
Le Bardarbunga, volcan situé sous l’un des trois plus grands glaciers du monde et s’élevant à quelque 2.000 m, est considéré comme assez dangereux pour menacer, le trafic aérien dans le Nord de l’Europe et l’Atlantique-Nord, tout comme l’Eyjafjallajokulll en 2010 et son camarade Grimsvötn en 2011. Ce trublion est de la famille des volcans sous-glaciaires ; autrement dit, on ne voit pas le cratère car l’activité volcanique se situe sous une épaisse couche de glace, de 150 à 400 m d’épaisseur. Mais surprise ! De la fumée y a été détectée il y a deux petites semaines. Le danger c’est qu’une éruption massive propulserait des panaches de cendres et de vapeur d’eau (liée à la fonte du glacier) dans l’atmosphère. Dès l’alerte lancée, 300 personnes ont été évacuées « par précaution », les vols ont étaient suspendus au dessus du glacier, toutefois… il n’y a pas encore le feu au lac ! plouf plouf.

Un peu d’histoire

1783, « Laki » : un des facteurs déclencheur de la Révolution française, oui oui !

Le Laki, ou Lakagigar, – nommé le « volcan de la Révolution » à l’époque de la prise de la Bastille – est responsable en 1783 de l’éruption volcanique la plus importante depuis la colonisation de l’Islande. Les conséquences sont catastrophiques et un tiers de la population islandaise décimé. Pour cause, en cet été 1783, la terre s’ouvre sur une longueur de 25 kilomètres et 130 cratères vomissent plus de 10 km3 de lave. Mais ce n’est pas tout. Un anticyclone puissant et centré durablement sur le nord de l’Atlantique envoie les fumées vers le reste de l’Europe. L’émission de dioxyde de soufre, coïncidant avec des conditions climatiques inhabituelles, provoque un épais brouillard sulfuré qui se répand à travers l’Europe occidentale, provoquant des milliers de morts durant l’année 1783 et l’hiver 1784, notamment à cause de la contamination des sols engendrant la famine. Un nuage de poussière recouvre alors les 2/3 de la France et se dépose en partie au sol. Les années suivant l’éruption du Laki sont marquées par des phénomènes météo extrêmes, dont des sécheresses et des hivers très rigoureux. A l’époque, on disait même que le pain et la viande gelaient sur la table de la cuisine et les corbeaux en plein vol. Enfin, c’est ce qu’on disait… Finalement, la situation des paysans français est si désespérée que la révolution éclate en 1789. Ces modifications climatiques et le volcan Laki ne sont clairement pas les seuls vecteurs du soulèvement populaire Français, mais les historiens admettent que leur influence est considérable dans les événements politiques qui mirent fin à la royauté. Merci l’Islande !

2010, Eyjafjallajokull : ce volcan qui n’aimait pas les stars

L’éruption du volcan Eyjafjallajokull provoque en mai 2010 un désastre écologique en Islande avec la formation d’un important panache volcanique, composé de vapeur d’eau, de gaz volcaniques et de cendres. Aussi étonnant que cela puisse paraître, les inondations glaciaires furent l’élément le plus destructeur ; le volcan en fusion provoquant la fonte du glacier qui le surplombe. De même, les cendres poussées par les vents dominants qui les rabattent sur l’Europe continentale, entraînent d’importantes perturbations à l’échelle mondiale dans le transport aérien. Nous sommes à l’aube du festival de cannes et Tim Burton prie pour la non fermeture des aéroports de la Côte d’Azur afin que le prestigieux festival de cinéma dont il était alors président du jury ne parte pas en fumée… Au delà de l’aspect écologique, le préjudice financier subi par les compagnies aériennes s’est élevé à 1,27 milliard d’euros selon l’Association internationale du transport aérien.

Islande, 2011 : petit frère fait sa crise.

Il est plus facile à prononcer que l’Eyjafjallajokull, mais ‘faut quand même s’entraîner, voici venu péter Grimsvötn ! Situé sous le glacier Vatnajökull dans le sud-est de l’Islande, il entre en éruption un an après son voisin de palier. Et gare aux secousses : c’est le volcan le plus actif du pays, avec neuf éruptions entre 1922 et 2004, dont quatre depuis 1996. Selon les autorités islandaises, le volcan ne s’est pas autant déchainé depuis un siècle ! L’éruption déclenche un immense nuage de cendres s’élevant jusqu’à une altitude d’une vingtaine de kilomètres. Mais contrairement à l’éruption de l’Eyjafjöll’, les vents sont assez faibles et ne soufflent pas vers l’Europe. Du coup, ses effets sur le trafic aérien sont bien moins importants que lors de cette précédente éruption en raison aussi de l’altitude différente du panache volcanique et de la durée de son émission (quelques jours contre un bon mois).

Interview, musique et montage : Thibault Pomares
Images : Julien Boluen
Article : Charlotte Espel

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