LE PS FAIT-IL DE L'INTOX A LA DALLE ?

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Mais qu’est-ce que c’est que cette affaire ? Dans les histoires les plus troubles de la campagne, en voici une qui ne ressemble vraiment à rien tant les avis et versions officielles divergent. La question de fond est « Nicolas Sarkozy a-t-il annulé une visite sur la dalle d’Argenteuil après que les socialistes aient révélé la préparation musclée de sa venue ? ». Vous savez, Argenteuil, où Nicolas Sarkozy s’était fait caillasser et insulter fin 2005 après l’utilisation du terme « racailles »… Ça commence bien, puisque cette affaire est déjà contestée : voir le contre-reportage d’Arrêt Sur Images intitulé « le Grand Bluff » ici : http://www.youtube.com/watch?v=aEHiTdXIOrw.

Ce qui nous intéresse donc cette semaine, c’est la révélation du Parisien du 9/02 selon laquelle Nicolas Sarkozy aurait prévu de se rendre samedi dernier à Argenteuil, et d’une phrase de Rachida Dati jeudi 8/02/2007 sur LCI (« une visite est en préparation ») ; la visite est « non confirmée » par l’UMP selon AP et même carrément démentie, selon le service de presse de l’UMP, joint par téléphone et un peu paumé. Projet de visite démenti aussi par la Préfecture de Police du Val-d’Oise et le cabinet du maire (UMP) George Mothron. Mais le porte-parole du MJS (Mouvement des Jeunes Socialistes), lui, est formel : Nicolas Sarkozy avait prévu de venir et a annulé grâce à leurs révélations.

Leurs révélations, c’est le « nettoyage d’Argenteuil pour préparer sa venue, à coup de CRS et agents des RG » qui auraient donc investi ‘la dalle’ il y’a quelques jours, tout nettoyé pour préparer une visite éclair, « un safari-photo ». « Si un Ministre de la République ne peut pas se rendre dans les territoires de la République [sans un tel dispositif], c’est un problème, et on ne peut que le déplorer. Et en l’occurrence, Nicolas Sarkozy en est responsable de A à Z depuis Novembre 2005, qu’il instrumentalise les banlieues », s’énerve Paul Meyer, porte-parole des MJS. Mais ce n’est pas tout, outre donc ce renforcement policier, l’UMP a aussi mandaté une association, créée le lendemain du passage du Ministre à Argenteuil pour être une interface avec les jeunes de cette banlieue, officiellement, mais pour « créer les conditions d’une visite de Sarkozy, et encore une fois instrumentaliser les banlieues » dixit les jeunes PS. Cette association au charmant nom emprunté au FN, est officiellement filiale de l’UMP mais sponsorisée par des fonds publics (la préfecture en l’occurrence, et à hauteur de 20 ou 40 000€ selon les sources, de quoi faire grincer des dents les autres associations du quartier), et guidée par Rachida Dati, qui était alors encore employée du Ministère.

Tout cela est démenti en bloc par la mairie d’Argenteuil ; « c’est une fabrique de la psychose par les médias ; depuis toujours nous avons dit qu’il n’y a aucune visite de prévue de Nicolas Sarkozy mais Le Parisien persiste ! […] Les journalistes, ils ne font rien mais ils sont capables de créer un état de panique » s’excite au téléphone un membre du cabinet de M.Mothron. La Préfecture de Police est aussi claire : « il n’y a eu aucun renfort de police dernièrement, nous n’avons jamais reçu de prévision de venue, ce sont des rumeurs ». Et sur le terrain ? Pareil. Sur la dalle à Argenteuil, pas un flic; et côté violence, la scène la plus hard à laquelle j’ai pu assister, c’est un schtroumpf tombant de vélo. C’est sûr, je n’ai certainement pas détecté les RG, mais les riverains sont clairs : « c’est calme ; ni plus ni moins que d’habitude » rassure le tenant d’un tabac sur la dalle. « La dalle, ça ne fait que 3 mois que j’y suis, avant j’étais à Bobigny… Et ici c’est bien plus calme. Je n’ai jamais eu de problème à ma brasserie » me raconte entre deux bières le tenancier de La Rotonde, aussi sur l’esplanade de l’Europe, au centre de la Dalle. Les autres riverains, au bout du comptoir d’une autre brasserie, se marrent dans toutes les langues et me confirment : « ça fait bien longtemps que Sarkozy n’est pas venu, il peut revenir si il veut on s’en fout… là c’est la campagne, ils s’intéressent à nous mais on ne veut pas se faire utiliser… Ah et pour vous répondre, non, y’a pas plus de flics qu’avant, c’est n’importe quoi vos histoires ».

Au Parisien, on ne lâche rien : « vous me demandez de révéler une source ?! Nous faisons notre travail, assumons notre article et n’avons rien à ajouter » m’a répondu, franchement outrée, la rédaction du quotidien, qui confirme donc que Nicolas Sarkozy aurait prévu de venir, se serait rétracté.

Et au MJS, on n’en démord pas. « Je suis persuadé et j’assume que le fait d’avoir démasqué l’association BBR, l’augmentation de la présence policière, et annoncé sa venue a empêché Nicolas Sarkozy d’apparaître samedi, comme prévu, à Argenteuil », proclame, sûr de lui, Paul Meyer, porte-parole du Mouvement. « C’est un coup monté depuis un an, avec le terrain préparé par Rachida Dati et BBR. Quand on voit certaines manifestations interdites pour ne pas troubler l’ordre public, c’est en fait certains déplacements de Nicolas Sarkozy qui devraient être interdits ! ». Le maire, lui, s’insurge : « le Ministre candidat peut venir à Argenteuil, il n’y aura pas d’émeute ».

Le financement de l’association BBR est peut-être « politisé » voire « favorisé », et personne ne pourra jamais dire s’il y’a eu un renfort des RG autour de la Dalle. Mais une chose est sûre, au Val d’Argenteuil, on est bien loin de ces considérations, et personne ne se sent plus traqué qu’avant. Pas plus de flics, la dalle n’aurait pas été nettoyée au karcher. Nicolas Sarkozy peut-il venir tranquille, comme l’indique, confiant, le maire ? Il n’a pas voulu prendre le risque cette semaine, puisque c’est Rachida Dati qui s’est rendue à sa place à Nanterre. Mais en tous cas, on peut regretter d’un côté le petit coup d’intox du PS, et de l’autre l’utilisation de fonds publics de l’UMP pour une association, « interface » entre N.Sarkozy et les jeunes de banlieue (c’est BBR qui a organisé la rencontre au Ministère du mois dernier). Le reste… A vous de juger.

Gregory Kapustin

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Les commentaires (4)

  1. Arrêtez John Paul de reprendre Arrêt sur images ou le BBB pour référence. L’absence de copinage dont se targue Daniel Schneidermann en voulant ainci prouver son objectivité est vraiment malsaine. Il se sert d’Arrêt sur images et du BBB pour assujetir et taper sur tout le monde et n’importe qui à la fois.

    Il n’est pas objectif et il ne révèle pas. Ce qui l’intéresse c’est de soumettre Laurent Joffrin aux coups des blogeurs, par exemple. Ou bien François Bayrou dont David Abiker réclame le passage sur le BBB. Tout est bon et sa situation à la télé le démontre, pour se situer au-dessus des autres, puisque lui, justement il ne copine pas. Non il ne copine pas il tape et ça le fait jouir.

    L’ambiance sur le BBB est insupportable. Des fils d’engueulades à n’en plus finir sur des sujets parfois carrrément obsènes, toujours limites, extrêmement limite. Et celle qui se targue, elle aussi d’une grande honnêteté, puisque elle non plus, elle n’utilise pas « les langues ascensionnelles », se permet d’insulter les gens.

    Arrêt sur images offre un véritable tremplin à des personnalités malsainnes qui prennent plaisir à faire souffrir et qui brandissent les coups qu’ils asseinent à tort et à travers comme des garanties d’objectivité. Arrêt sur arrêt sur images. Arrêtez d’alimenter les désirs pervers de Daniel Schneidermann.

  2. RE:
    Je regrette profondément que l’Association Bleu Blanc Rouge soit perçue avec si peu de discernement. On désapprouve les Jeunes quand ils manifestent leur mécontentement hors des règles du jeu, on désapprouve quand ils font des efforts personnels et on les blâme quand ils choisissent la voie du partage.

    La part d’égoïsme qui habite les êtres humains dépasse ce à quoi je me suis toujours attendu.
    Dites vous que l’association BBR, en réalité, existée dans l’esprit de ceux qui la constitue bien avant la venue du Ministre de l’Intérieur de l’époque. Sa venue, tard dans la nuit, n’a été pour nous que l’occasion de dire ce qu’on avait sur le cœur. Il était libre ce soir là de ne pas nous écouter ou au mieux de faire un semblant obscure.

    Quand nous avons accepté de répondre à son invitation ce 1er novembre 2005 lui-même, j’en suis sur, ne s’attendait pas à nos revendications, à notre promptitude, à notre clairvoyance et à la pureté de nos âmes pourtant meurtries par les souffrances que sont les nôtres.

    Ce groupe d’argenteuillais si hétérogène avait pourtant bien une chose en commun : la connaissance parfaite des bas des tours. Ajoutez à cette connaissance les quelques autres acquises, comme SARKOZY, au prix de l’effort personnel et cela se transforme en un travail collectif d’une qualité telle, à notre niveau, que nous avons eu la prétention de proposer au Ministre d’organiser notre conférence-débat au sein même de votre Ministère chers compatriotes.

    Pour nous, cela restera gravé à tout jamais dans nos mémoires et pour certains d’entre vous qui connotés si maladroitement et pourtant si démocratiquement notre démarche cela ne changera rien. Mais dans ce cas, vous serez encore les derniers à réaliser que sans un travail acharné il n’y a point de salut.

    Je vous souhaite, en toute état de cause, de continuer à croire en l’avenir sinon pour vous au moins pour vos enfants.

    La route est encore assez longue et nous encore épars il faudra au prochain Président « jeter quelques masses de granite sur le sol de la France » pour rétablir l’équilibre BBR tant attendu par nous tous.

    Président de l’Association Bleu-Blanc-Rouge
    Nadji HAMIDA

    P.S: Nos comptes devenus la cause de tous les maux, je réaffirme l’obtention d’une subvention de 20000€ appelée aussi subvention d’aide au démarrage dans le cadre de la politique de la ville. Pour se faire nous avons pensé un projet (6 mois de travail), que nous avons ensuite soumis à l’appui de la demande de subvention. Une réponse positive nous est parvenue 6 ou 7 mois plus tard soit un délai « raisonnable » d’une année. Nous avons ainsi pu acheter quelques ordinateurs et un peu de mobilier. Quant au local de 10m², on doit le libérer pour sa remise aux normes. Alors, si quelqu’un, quelque soit son opinion politique, a un local à nous louer sinon à nous prêter nous restons ouvert aux propositions.

    Merci

  3. à Monsieur Kapustin

    Cher Monsieur,

    Vous ne savez pas à quel vous êtes dans la vérité dans l’ensemble, notamment pour ce qui concerne l’instrumentalisation par le PS de la dalle et des argenteuillais.

    Deidi, argenteuillais de toujours

  4. Le Point

    Six mois après les émeutes, alors que Montfermeil et Clichy-sous-Bois se réveillent à nouveau, comment les banlieues jugent-elles le ministre de l’Intérieur ? Reportage sur les traces de Nicolas Sarkozy.

    Bienvenue en banlieue.

    Direction Argenteuil. Après tout, c’est de là-bas que le mot « racaille » est venu, surgissant des lèvres d’une habitante excédée interpellant le ministre depuis sa fenêtre, le 25 octobre 2005. Dans le train, on dresse l’oreille en entendant un trentenaire évoquer les événements de la veille. Pas seulement Evry, où l’affrontement de deux bandes a laissé sur le carreau un jeune homme de 16 ans, tué à coups de poignard, mais aussi Villeneuve-Saint-Georges, où vit le passager. Un autre affrontement entre bandes rivales, avec des coups de feu au petit matin. « Je les entendais crier : « Si on le retrouve, on le crève », explique-t-il à son compagnon de voyage. Je me suis dit que j’allais attendre avant de sortir le chien, parce que s’ils me crèvent le chien, c’est moi qui les crève. » On le questionne : « Soutenez-vous Sarkozy, qui veut nettoyer les cités ? » La réponse fuse : « Avec lui, c’est pire : il joue trop avec le feu, et c’est nous qui brûlons
    La dame à la « racaille », elle, est introuvable. « Il paraîtrait que ce n’est pas une actrice », lance la responsable de l’association Maison pour tous, qui explique combien il est pour elle difficile de continuer le travail quand on « casse la confiance, si vitale ici ». « La dalle a servi de scène, les gens étaient au spectacle, et Sarko, c’était l’artiste : il s’est servi des habitants du quartier pour rester au top 50 des médias », ajoute-t-elle, en évoquant, par comparaison, la visite de Catherine Vautrin, ministre déléguée à la Cohésion sociale, dans le cadre de la loi pour l’égalité des chances. « Ça, c’était de l’intime, et en plein jour, bien préparé, sans une armada de caméras pour exciter les jeunes. »

    Certains d’entre eux, pourtant, ont tiré leur épingle du jeu médiatique. Au point d’être reçus par le ministre quelque temps après l’avoir interpellé sur la dalle. Aujourd’hui, ils lancent l’association BBR, dont le but est d’accompagner les jeunes du quartier vers l’emploi et le logement en leur offrant les services d’un expert en coaching. BBR, comme bleu, blanc, rouge, pied de nez lancé aux employeurs qui ne recrutent que des «Blancs ». « Si Sarkozy n’était pas venu à Argenteuil, nous n’aurions jamais été reçus pendant trois heures Place Beauvau, explique Nadji Hamida, 30 ans, Président de l’Association. Nous avons formé un groupe destiné à apporter des idées à l’UMP, mais aussi à la France. Pour lui montrer que la banlieue, ce n’est pas forcément morose. » Pour cet ancien étudiant en droit, Nicolas Sarkozy est « le DE GAULLES des temps modernes », qui « choque parce qu’il est avant-gardiste » . Mieux, « il est le seul à avoir compris que les jeunes des quartiers ne souffrent pas d’un manque de loisirs, mais d’un manque de prise au sérieux, poursuit-il. Ils ne veulent pas devenir des professionnels du baby-foot, mais des professionnels tout court ». Quant au style musclé de la visite ministérielle, elle n’a pas choqué le jeune homme, qui soutient le ministre, tout en refusant de condamner les caillasseurs : « C’était un appel au secours, dit-il. Maintenant, un ministre a le droit de se rendre dans n’importe quel endroit et à n’importe quelle heure, et après tout, il n’est pas ministre de la diplomatie (sic). » Place Beauvau, leur interlocutrice est Rachida Dati, ex-magistrate au parquet d’Evry et conseillère technique de Sarkozy. « Elle donne envie de réussir. »

    Mais BBR est une exception.