MARSEILLE MUNICIPALES : UN ENJEU RÉSOLUMENT NATIONAL

Publié le | par

Après la lettre du Président Sarkozy à Jean-Claude Gaudin, c’est Gérard Collomb le vainqueur PS de Lyon qui est venu soutenir Jean-Noël Guérini, président du Conseil général des Bouches-du-Rhône, le challenger du maire sortant. Le duel s’annonce serré et l’enjeu désormais est résolument national.

guerini-collomb1.JPG

photo : Nathalie Mazier

Quand Collomb vient soutenir Guérini à Marseille

Jean-Noël Guérini a reçu jeudi après-midi la visite du maire de Lyon, Gérard Collomb, réélu au premier tour de scrutin des élections municipales dimanche. Le binôme socialiste a arpenté les premier et cinquième arrondissements de la ville qui font parti des deux secteurs clés (1e et 3e) et que Guérini doit conquérir à tout prix pour gagner lui aussi.
Entouré d’une nuée de journalistes, la ballade des deux hommes est loin de passer inaperçue. Les militants vêtus de tee-shirts rouges donnent le tempo, ils distribuent leurs tracts tandis que les journalistes se battent pour immortaliser une photo ou une anecdote. C’est chose faite lorsque Gérard Collomb remet à Jean-Noël Guérini un porte bonheur « pour qu’il gagne dimanche » : ce dernier le remercie chaleureusement dans un sourire rayonnant. Le candidat marseillais serre des mains, reçoit les encouragements des passants. Il fait de l’image aussi en saluant des conducteurs qui scandent fenêtres ouvertes : « allez Guérini ! ».
Arrivé au bar des Danaïdes, près de l’église des Réformés, il distille des « je compte sur vous », aux personnes installées en terrasse. Certains paraissent étonnés par cette visite. Une conférence de presse s’improvise à l’intérieur du bar. Le maire de Lyon en profite pour souligner « seule une alliance entre les métropoles permet la compétitivité, si Jean-Noël est élu, la coopération sera totale. » A ses yeux, son ami est « à un petit doigt de la victoire ». « Si j’étais Marseillais, je voterais Jean-Noël Guérini », dit-il, dans un sourire. C’est l’occasion aussi pour Jean-Noël Guérini de fustiger les attaques personnelles dont il est victime depuis trois semaines et celles faites à l’encontre de sa femme, en raison de son origine juive.
Le moment est bref, les hommes trinquent à la victoire avec un demi de bière : « Vous pourrez titrer Guérini met la pression demain », lance Gérard Collomb, amusé. Ou comment mettre la pression sur l’Elysée en montrant que Marseille est à quelques voix de passer à gauche, comme Lyon l’est déjà.

Nathalie Mazier

Ambiance lors de la soirée électorale du 1er tour, dimanche dernier, par nos deux correspondantes, et enjeux de ce deuxième tour.


marseille1.jpg

photo : François Creusot 

Marseille : les enjeux – le troisième ou rien

Au coude à coude sur l’ensemble de la ville, le duel entre Jean-Noël Guérini, président du Conseil général des Bouches-du-Rhône et Jean-Claude Gaudin s’annonce serré. Tour d’horizon des secteurs clés.

Depuis le mois de février, les sondages donnent Jean-Noël Guérini gagnant avec 40% des voix au premier tour contre 37% pour le maire sortant. Pour le candidat socialiste, la tache n’est pas simple. Sur les huit secteurs que compte la ville, cinq étaient détenus par la droite, trois par la gauche. Pour gagner, le candidat socialiste doit en conquérir deux. Dans le premier secteur (1er et 7e arrondissement) Patrick Mennucci (PS) fait figure de vrai challenger face au maire sortant, Jean Roatta (UMP). Mais la clé du scrutin se trouve dans le troisième secteur, fief de Renaud Muselier, premier adjoint à la mairie centrale, et Bruno Gilles, actuel maire de l’arrondissement. Le président du Conseil général a joué le tout pour le tout en quittant son secteur du deuxième arrondissement pour se présenter face à Renaud Muselier. Là aussi, les sondages prédisaient un coude à coude.
C’est un tout autre scénario qui s’est joué dimanche soir. Peut être même l’élection. Dans le premier secteur, 183 voix séparent Jean Roatta de Patrick Mennucci. (39,94% contre 39,21% des voix). Le duel du second tour s’annonce serré. Par contre, dans le troisième secteur, c’est une claque pour Jean-Noël Guérini, devancé de cinq points par Renaud Muselier, (42,8% contre 37,4%).
Pour gagner, Jean-Noël Guérini n’a plus le choix. Il doit conquérir les voix du Modem de Jean-Luc Bennahmias qui ne se maintient dans aucun secteur à cause de ses faibles résultats (5,54%) contre les 8 à 10 % espérés. Lundi soir, le Mouvement démocrate a annoncé la fusion de sa liste avec celle de Jean-Noël Guérini. Le candidat socialiste avait reçu l’appui de la liste d’extrême gauche, mais l’alliance avec le MoDem risque de déranger ces électeurs-là. Dimanche, tous les regards se porteront vers le troisième secteur. C’est là que se jouera l’élection municipale.
Nathalie Mazier et Sibylle Delaitre

marseille22.jpg

marseille3.jpg

photos : François Creusot

Dimanche soir, deux récits de nos correspondantes.

Le flot de chiffres

Soir de résultats d’élections municipales en préfecture de Marseille. Une dizaine de journalistes des médias régionaux sont assis autour d’une grande table avec téléphone et fax à disposition, et deux écrans télévisés en face d’eux. Pour avoir les chiffres définitifs des huit secteurs, il faudra attendre 23H, le temps de dépouiller les 462 bureaux de vote de la ville. Les premiers résultats sont ceux des petites communes des Bouches-du-Rhône. Ils s’enchaînent. Mais toujours pas de tendance pour Marseille. On tente de capter une rumeur de résultat, rien.
La première tendance nous l’apprenons vers 21H par France 3 : l’estimation Ipsos donne 41% pour Jean-Claude Gaudin contre 37% pour Jean-Noël Guérini. Mais quelques minutes après, rectification, c’est égalité : 40,1% partout. « Ça va être chaud ! » lance un confrère.
On l’attendait ce coude à coude alors tant mieux.
Un candidat de la liste Front National souffle quelques informations au journaliste de l’AFP. « Apparemment on serait à 10% » murmure-t-il.
Pendant que certains font des pronostics, les chiffres continuent de circuler. Arles reste communiste, Toulon à droite. Scrutin serré à Aix-en- Provence avec le maintien de quatre candidats au second tour.
Nouvelle estimation, 41% pour Gaudin, 39 pour Guérini.
Et un retard de cinq points pour le président du Conseil général dans le 3e secteur. Il faut attendre 1H du matin pour obtenir les résultats définitifs de Marseille. A cette heure, une chose est sure, le duel tant annoncé aura bien lieu.

Nathalie Mazier

Comme si tout était déjà joué…

Au centre de l’élection municipale à Marseille, le duel Gaudin-Guérini. Un duel attendu, désiré, après deux élections sans enjeux. Et pourtant au cœur de l’action, place du quatre septembre, au QG de campagne du parti socialiste, une grande impression de vide, de désordre. Ambiance.

Dès l’arrivée, le décor est planté. « On est au courant de rien », prévient le vigile, « Vous êtes journalistes, et bien revenez d’ici une heure et on verra ». Une heure plus tard, nouvelle tentative, cette fois la salle de presse est ouverte. Impression de vide dans cette immense pièce au milieu de laquelle trône un simple pupitre entouré de bannières « Faire gagner Marseille ». Seuls France Bleu et LCM (La Chaîne Marseille) sont bien déjà en place. Les premiers directs sont prévus une demie heure plus tard, alors il faut improviser. Parce qu’à 19 heures, dans le QG du principal opposant au maire sortant de Marseille, deuxième ville de France, c’est le calme plat. Comme si finalement rien ne se jouait ce soir, ou comme si tout était déjà joué.
Rien ne filtre, la personne chargée des relations avec les médias pour le Parti Socialiste a l’air perdue. Elle papillonne entre les journalistes, mais au fond rien ne filtre. Ni chiffre, ni même tendance.
D’un seul coup, un peu d’animation. Il était temps. Le disjoncteur lâche, et voilà tout le premier étage de la permanence plongé dans le noir. Rien à faire, il ne se remet pas en route. Les directs s’improvisent au téléphone, faute de mieux. Décision est prise de déménager au rez-de-chaussée. La salle du pôle multimédia du PS fera l’affaire. Au moins là bas, il y a une télé pour pouvoir suivre l’évolution des tendances. France 3 et LCM tournent en boucle. Le parti donne ici l’impression de se préoccuper de tout, sauf des résultats. Personne ne reçoit vraiment les estimations de sortie des urnes. Les scores se transmettent en catimini, d’oreille à oreille. Guérini derrière Gaudin puis à égalité. Tout se jouera secteur par secteur. Et a priori c’est là où le bas blesse.

LCM annonce enfin les estimations dans le 3e secteur, secteur clef où Guérini est venu affronter l’UMP Renaud Muselier sur ses terres. La messe est dite. Ca sera très compliqué pour Guérini, distancé de 5 points par la droite.
Il ne reste plus qu’une chose à attendre : l’arrivée du grand chef. Ce bâtiment a beau être son QG, il est introuvable. Normalement, il devait s’exprimer à 22 heures mais il est presque 23 heures et il n’y a personne. Son attachée de presse tente de calmer les journalistes massés depuis plus d’une heure devant la porte pour ne surtout pas rater les plans de son arrivée. « Vous allez prendre froid pour rien. Ne dites pas que je ne me soucie pas de votre santé ! » Après une longue attente, le voilà enfin. Il s’engouffre difficilement jusqu’à la salle de presse qui a encore changé de place. Il s’installe au pupitre prêt à prendre la parole. Mais c’est sans compter sur l’indélicatesse d’une journaliste radio qui ne trouve rien de mieux que de se battre pour pouvoir avoir « un son ». Quelques cris raisonnent dans la salle mais la simple menace d’une expulsion suffit pour calmer le jeu.
Le candidat prend la parole. Cinq minutes, pas plus. Il appelle à la mobilisation autour de son projet, et salue la poussée de la gauche à Marseille. Pas un mot sur son score dans le 3e secteur. Il est suivi de peu par Patrick Mennucci, son directeur de campagne et candidat dans le premier secteur. Lui se prête un peu plus aux questions des journalistes. Mais au bout de vingt minutes, tout est fini. La pression retombe. Aucun chiffre n’est tombé dans ce QG dans la soirée, Jean-Noël Guérini est passé juste dix minutes. Mais voilà pourquoi il fallait être là. Parce que ces quelques minutes ont peut-être été les plus éloquentes : comme si c’était déjà joué.

Sibylle Delaitre

Relire notre article, « GAUDIN : PREMIÈRE VICTIME DU CARTON JAUNE A SARKOZY ? » :

Partager cet article

Les commentaires (6)

  1. Pour faire une bonne bouillabaisse
    Il faut se lever de bon matin
    Préparer le pastis et sans cesse
    Raconter des blagues avec les mains

    En tous cas, ils sont en train de nous en faire une belle de bouillabaisse à Marseille !

  2. Je connais mal les deux mets en préparation, mais logiquement ils devraient sentir le poisson.

  3. Quand un marseillais ne parle plus, c’est pas bon signe !!!

    Les journalistes parisiens n’ont pas compris que pour renifler la bouillabaisse…il faut passer dans l’arrière cuisine de l’entre deux tours….
    C’est là que ça mijote…
    Pas la peine de se géler les arpions jusqu’à 1H du matin ….
    Foi de provençale !