[Hollandie] Un Accord Transatlantique encore Transcendant

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Si par deux fois les amerlocains nous ont envoyé leurs troupes en notre faveur (ne sommes nous pas en pleine séance commémorative en ce moment !?…), les voici désormais motivés à nous refourguer leurs troupeaux sans saveur !

 

Résumé de la situation

Cela fait plus de 20 ans que des accords de libre échange entre les États-Unis et l’Europe sont tissés plus ou moins largement et en dehors du cadre multilatéral de l’OMC. Cette fois encore, mais plus durement, l’accord commercial transatlantique (le Trans-Atlantic Free Trade Agreement ou TAFTA, encore connu sous le nom de TTIP pour Transatlantic Trade and Investment Partnership) est plus que jamais dans les tuyaux.

L’Union européenne a décidé officiellement d’engager les négociations avec les USA depuis les 17 et 18 juin 2013.Et les enjeux de cet accord sont d’une toute autre ampleur. Mandatée pour la négociation de ce partenariat, la Commission européenne a invoqué le haut bénéfice de TAFTA pour la croissance et l’emploi dans l’UE.
Seulement les pourparlers se jouent à l’abri des regards indiscrets. Parlons même de complète opacité !Malgré les règles de l’UE en vigueur en matière d’accès à l’information, aucune liste des personnes composant les groupes de travail.

Tout juste sait-on que Karel de Gucht est encore et toujours à la baguette, en tant que commissaire européen au Commerce (cf. ACTA entre autres).

Le projet actuel dit de « partenariat transatlantique pour le commerce et l’investissement » (PTCI, en anglais TTIP) est un accord de dérégulation, de suppression des protections collectives, de libre dumping.
Son but principal est d’abaisser les barrières douanières qui existent encore, de manière que les marchandises, les services et les capitaux circulent mieux, plus vite, plus loin. Ne pas croire que les États-Unis seraient les gros méchants de l’histoire. La Commission européenne multiplie depuis 2006 les accords bilatéraux de ce genre. Avec la Colombie, la Corée du Sud et le Pérou, en attendant Singapour et les pays dits ACP (Afrique-Caraïbes-Pacifique).
Le texte du mandat est explicite à cet égard :
 « L’accord doit prévoir la libéralisation réciproque du commerce et de l’investissement des biens et des services, ainsi que les règles sur des matières ayant un rapport avec le commerce, avec un accent particulier sur l’élimination des obstacles réglementaires inutiles. L’accord sera très ambitieux allant au-delà des engagements actuels de l’OMC. L’accord s’imposera à tous les niveaux de gouvernement. »
Ce qui signifie que la négociation va aborder trois domaines : l’accès au marché, les réglementations et les barrières non tarifaires, les normes.

Les conséquences des précédents accords bilatéraux, dont l’accord de libre échange nord américain (ALENA, conclu entre les Etats-Unis, le Canada et le Mexique) n’est pas des moindres, devraient laisser à réfléchir.

Exemple avec les barrières non tarifaires : les normes

Le maintien des normes alimentaires est un des sujets majeurs d’inquiétude lorsque l’on évoque la question de ces négociations.

Tout dernièrement, la commission des finances du Sénat américain s’est réunie et les membres ont plaidé pour une levée des obstacles européens aux importations de volailles et de bœufs traités chimiquement.
De longue date, c’est un euphémisme de dire que l’Union Européenne (UE) n’adopte pas les méthodes de transformation de la volaille et certaines méthodes de production américaines de bœuf. Ladite commission des finances du Sénat américain souhaite au contraire que les deux parties à l’accord résolvent

 

« les obstacles injustifiés aux exportations agricoles des États-Unis, y compris le bœuf et la volaille ».

 

Il est question précisément des fameux bœuf et le porc dits « aux hormones » car élevés en utilisant un médicament vétérinaire favorisant la croissance (ractopamine), médicament approuvé par le Codex l’an dernier malgré les objections de l’UE.

Les sénateurs US semblent convaincus que l’obstacle des questions sanitaires et phytosanitaires est surmontable. Cela d’autant plus assurément que l’UE avait abandonné son interdiction d’utiliser uniquement de l’eau chaude et de la vapeur comme traitement antimicrobien dans la production de viande lorsqu’elle a autorisé l’utilisation de l’acide lactique sous la pression américaine l’an dernier (et dire que certains lanceurs d’alerte étaient déjà vilipendés à cette époque quand ils annonçaient que c’était faire rentrer le loup dans la bergerie que d’accepter pareilles méthodes… Toujours ces mauvais augures !?).

L’objectif premier est bien de faire fléchir l’UE sur les restrictions de certains traitements des agents pathogènes (PRT) utilisé par les transformateurs de volailles américaines.

 

 

Cette année, le département américain de l’Agriculture (USDA) a tranquillement demandé à obtenir l’approbation de l’UE pour le péroxyacide, un autre PRT utilisé par l’industrie américaine (le peroxyacide est l’un des quatre traitements antimicrobiens aux States permettant un traitement post-abattage de la volaille, mais l’UE ne l’autorise pas ; les autres sont le dioxyde de chlore, le chlorite de sodium acidifié et le phosphate trisodique).

Plus généralement, sont déjà généralement critiquées la réglementation fondée sur le « principe de précaution » et les préférences culturelles contre l’utilisation de produits chimiques et d’hormones dans la viande bovine et la production porcine. Les EU ont exigé que l’UE mette ses pratiques réglementaires en conformité avec les normes du Codex.

Comme solution provisoire au différend sur l’interdiction des hormones, les États-Unis et l’UE ont convenu d’un quota actuellement fixé à 45.000 tonnes de viande de bœuf sans hormone des États-Unis et d’autres pays. Le quota est ouvert aux exportations de bœuf des États-Unis, d’Australie, d’Uruguay, de la Nouvelle-Zélande et du Canada, mais cette année le contingent tarifaire doit être modifié afin de garantir aux exportateurs américains « un accès durable » au marché européen.

Enfin, les lobbies agricoles des États-Unis ont fait valoir leur opposition à l’augmentation des normes de bien-être animal dans le TTIP, de peur que l’UE essaye d’y intégrer ses règles plus strictes. Dans l’élevage de poulets, par exemple, les agriculteurs de l’UE doivent observer les règles sur la taille des cages qui ne sont pas imposées dans les normes agricoles des États-Unis. Un désavantage concurrentiel à l’exportation selon les industriels européens.

Brèfle. Un accord qui n’a pas fini de faire parler. Que ceux qui concluent que tous leurs problèmes viennent de « l’Europe » vont devoir élargir leur périmètre de reproches…

Lurinas

 

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