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Après la Trêve… L’Expulsion?

Publié le | par

40 000 personnes reçoivent un avis d’expulsion chaque année. Un chiffre en constante augmentation (+37% en 10 ans entre 2002 et 2012). Cette année, Mohamed et Faïza font partie de la vague. Le couple s’est vu pris dans un engrenage juridique qui les dépasse et se préparent à partir après la fin de la trêve hivernale le 1er avril prochain.

« On est sous tension permanente »

Locataires depuis 5 ans dans un appartement dans le 20e arrondissement de Paris, Mohamed et Faïza avaient reçu l’ordre de déposer les clés le 1er octobre, un mois avant la trêve hivernale.  « Ca touche tellement de monde dans le quartier ! Il y a des histoires d’expulsion toutes les semaines ici ! », lance une passante, interpelée par le petit attroupement matinal des voisins rassemblés autour d’un petit déjeuner, au pied de l’immeuble.

« Je ne dors plus, et au moindre bruit, je crois que c’est eux, j’en deviens complètement parano ! » se désespère Faïza en jetant un œil sur le loquet de la porte d’entrée. « On est devenu coupable du jour au lendemain, et on doit se cacher et élaborer des stratégies, comme des criminels… » ajoute Mohammed.

Comme beaucoup d’immeubles, celui dans lequel le couple vit a été racheté à la découpe par une société financière. Leur appartement a ensuite été revendu à un particulier, qui souhaite pour son bien une nouvelle destination. Un propriétaire qui n’est « jamais venu se présenter » raconte Mohammed. « On a su en juillet seulement que le propriétaire avait changé, lorsqu’on a reçu un courrier de demande de congé nous réclamant de quitter les lieux le 1er octobre ». La raison ?  Plusieurs mois de loyer impayés. Il est musicien, elle est peintre, et ni l’un ni l’autre ne parvenaient à vendre assez pour vivre. Ils payaient donc leur loyer grâce au RSA et aux APL auxquels ils avaient droit. Mais au mois d’avril dernier, toutes leurs aides avaient été coupées, à la suite d’un courrier du propriétaire à la CAF disant que le couple ne vivait plus dans l’appartement.

Une situation douteuse aux vues d’une réglementation bien précise

Ni prévenus de la vente de l’immeuble, ni contactés pour l’achat éventuel de l’appartement dans lequel ils logeaient depuis 5 ans, ni même destinataires des actes de l’huissier, c’est une procédure d’expulsion bien douteuse étant donné les règles très précises en la matière… Dans la loi, le propriétaire peut en effet délivrer au locataire un congé pour vente, reprise ou motif légitime et sérieux mais il doit le faire savoir six mois avant la fin du bail. Il peut ensuite assigner le locataire devant le juge pour demander son expulsion si ce dernier n’a pas trouvé de logement à l’expiration du délai. Le locataire est alors informé par acte d’huissier, remis en main propre à son domicile ou qu’il doit retirer à l’étude de l’huissier. Et durant toute la procédure, le locataire doit être informé par acte d’huissier, toujours remis en main propre.

Un sentiment d’injustice… justifié?

Alors comment se peut il que Mohammed et Faïza n’aient pas reçu les actes de l’huissier et qu’ils n’aient pas été mis au courant de la vente du bien ? Calcul du propriétaire ou erreur d’inattention des locataires ? Selon Mohammed, le propriétaire aurait intercepté le courrier : pour lui, « il n’y a pas d’autre explication ». Ni pour lui, ni pour Faïza, ni pour les voisins solidaires. Calcul ou inattention, volontaire ou subie, Mohammed et Faïza se sentent vulnérables et attaqués par l’injustice. « Devoir partir d’un logement je veux bien, s’insurge Mohamed, le propriétaire a le droit de le faire et c’est normal. Mais ce qui n’est pas normal ce sont les conditions dans lesquelles ça a été fait, sans rien nous dire, et nous faisant couper toutes nos aides… ».

Comme beaucoup d’autres locataires dans leur situation, ils ne s’y attendaient pas, « jamais on aurait pensé pouvoir un jour être touché par la menace d’expulsion… », avoue Faïza. Du jour au lendemain, ils se sont trouvés de l’autre côté de l’humanité, celle qui est à la rue et devant laquelle ils passaient auparavant avec un regard de pitié en pensant la frontière infranchissable.

La trêve hivernale maintenant commencée, Mohamed et Faïza ont jusqu’à mars pour obtenir des délais, ou une annulation. Si le jugement (obligatoire avant toute expulsion) leur est défavorable, ils pourront obtenir des délais de 3 mois à 3 ans, pour se reloger. Loin de Paris certainement, faute de revenus suffisants.

Naissance d’un mouvement de solidarité dans le quartier

Mais si l’espoir est mince pour Faïza et Mohammed, fatigués et dépassés par l’événement, leur expérience aura créé un terreau de solidarité au sein du quartier et redonné du courage à ceux qui ne se sentent désormais plus seuls face à l’expulsion. « C’est incroyable ce mouvement, je ne m’y attendait pas du tout ! » lance Mohamed. « On se sent entourés, vraiment, et ça, je ne l’aurais jamais cru ». Depuis le 10 novembre, un collectif pour lutter contre les expulsions s’est mis en place dans le quartier et rassemble déjà une trentaine de personnes. Mohamed et Faïza savent désormais comment ils occuperont tous leurs dimanches jusqu’à la fin de la trêve hivernale… « Rien que pour ça, pour toutes ces belles rencontres, je ne regrette rien ! On était plutôt du genre dans notre coin, sans trop parler à nos voisins et là, c’est un tournant dans notre vie, c’est sûr ! », s’enjoue Faïza. « Un tournant qui nous mènera on ne sait encore trop où, on verra bien… ».

 Flore Viénot

Des liens

Un article du monde sur l’explication des chiffres de l’expulsion

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Les commentaires (1)

  1. Cette situation est fréquent!! Merci pour votre article car je trouve que c’est vraiment intéressant. Faiza et mohamed, plusieurs personns sont dans les mêmes situations.

    Bonne continuation