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Joyeux Bordel : Dans la Peau d’une Pute (1/2)

Publié le | par

Alors que les députés tentent d’abolir le « plus vieux métier du Monde », Charlotte « Stagiaire de Choc » Espel vous emmène en immersion dans la putosphère. Première partie de cette mini-enquête, à la découverte des regards sur les métiers du sexe.

Tourisme sexuel, migration volontaire ou forcée vers des pays plus riches : la prostitution cristallise avec une crudité particulière les inégalités à l’œuvre tant entre le Nord et le Sud qu’au sein de chaque société.

La prostitution en question

La prostitution est un sujet de société dont on parle beaucoup, mais auquel on trouve finalement peu de solutions. J’ai donc voulu me concentrer sur la prostituée, trop souvent reléguée au rang d’esclave soumise au patriarcat et à la domination masculine. L’image même de la prostituée véhicule beaucoup de clichés et de fantasmes : sale pute, pauvre fille, quelle honte … On entend toutes sortes de jugements à leur sujet mais leur a t-on vraiment donné la parole ?

J’ai donc voulu brosser en quelques traits « une » réalité du système prostitutionnel, sans tabous, fausse pudeur ou mièvrerie. Le but était de m’inscrire en faux contre les idées reçues en essayant de comprendre qu’est ce qui les a poussé sur le trottoir. Ont–elles vraiment choisi ce métier ? Si oui, était-ce vraiment un choix ? Si non, comment les a t-on forcées ?

On entend régulièrement des gens condamner la prostitution, la décrivant comme un système qui s’inscrit dans des rapports sexistes, marchands et sociaux de pouvoir ; qui se fonderait sur la violence et la domination d’un sexe par rapport à l’autre.  N’est-ce pas un poil réducteur ?

Défaire les préjugés

La prostitution, plus vieux métier du monde ? Foutaises ! Cette fausse acception est une idée dangereuse qui tend à faire accepter la prostitution comme une fatalité, un fléau contre lequel on ne peut rien faire tellement il est inhérent à la nature humaine. S’il vous plait Messieurs, remontez vos braguettes et cessez de croire que vous avez un droit au sexe !

Les abolitionnistes vous diront en cœur que cette activité n’est pas un métier. La qualifier de métier serait selon eux une manière de nier toute dimension de souffrance et d’atteinte à l’intégrité physique des femmes, à leur dignité. Mais allez dire cela aux travailleuses du sexes et fière de l’être et vous serez houspillés !

Historiquement, la prostitution n’avait rien de lucratif ; il s’agissait de faire un don de soi aux divinités, le corps était abandonné dans une dimension spirituelle. Mais avec l’essor du commerce, le système prostitutionnel devient un commerce réglementé qui n’a vraiment plus rien de sacré.

L’histoire de la prostitution est une histoire à géométrie variable avec des phases de tolérance, de prohibition, de légalisation… Mais quelque soit le choix de société pour tel ou tel système, les prostituées sont toujours considérées comme une sous-classe, des êtres indignes en marge de la « bonne société » et à ce titre stigmatisées.

JOYEUX-BORDEL-ILLUSTRE

Capitalisme et marché du sexe

Consommer, consommer ! Ils n’ont que ce mot à la bouche. Alors consommer le corps d’un ou d’une prostitué, quoi de plus normal ! Les profits des industries du sexe sont colossaux : 60 milliards d’euros par an pour la prostitution, 1 milliard pour les agences de tourisme sexuel travaillant à partir du web, entre 8 et 13 milliards par an en ce qui concerne les profits de la traite.

La prostitution se décline à présent pour tous les gouts et les couleurs : putes de rues ou marcheuses, escort girl, hôtesses, dominatrices… Les nouvelles technologies comme internet sont aussi devenues un vecteur essentiel de promotion et d’exploitation sexuelle.

L’Office central pour la répression de la traite des êtres humains (OCRTEH) estime dans son rapport de 2000 que les rentrées annuelles de la prostitution pourraient se situer pour la France entre 2 et 3 milliards d’euros, dont 70% reviendrait aux proxénètes. Ces derniers pourraient ainsi gagner jusqu’à 9000€ par jour, les putes rapportant entre 300 et 800€ par jour (seulement 50€ en poche à la fin de la journée… joli tour de passe-passe !).

La mondialisation capitaliste est le facteur dominant dans l’essor fulgurant de la prostitution et de la traite des femmes et des enfants à cette fin. Cette industrie qui exploite la misère sociale est à la confluence des relations marchandes capitalistes et de l’oppression des femmes.

La paupérisation qui ravage de nombreuses régions du monde déstructurées par l’économie libérale mondiale est une manne pour les réseaux de proxénétisme mafieux. Chaque année, des millions de femmes et enfants sont transférés vers les grands centres urbains pour servir de chair fraiche à la demande exponentielle des clients en mal d‘exotisme.

Écouter la parole des prostitués

Puisque ce sont elles que l’on envoie au « front », il est impossible de ne pas écouter leurs revendications.

D’un côté, les abolitionnistes qui ont le vent en poupe depuis que Rosen Hicher, ancienne prostituée et survivante de la prostitution, a marché 800km pour l’abolition du système prostitutionnel. Elle m’a dit vouloir « réveiller les sénateurs » sur la réalité du phénomène ; afin qu’ils prennent enfin position sur la question. C’est au premier congrès international pour l’abolition de la prostitution que je les ai rencontrées. Ces femmes survivantes de la prostitution sont venues des quatre coins du monde pour exprimer leur soutien à la cause abolitionniste. Elles dénoncent unanimement la violence extrême de tout acte sexuel imposé par l’argent et l’abus de situations de vulnérabilités.

D’un autre côté, les putes et fières de l’être. Même si elles ne représentent qu’une minorité sur l’ensemble des prostitués ; elles revendiquent un statut de travailleur du sexe qui les sortirait de cette zone de non droit. Elles demandent des droits sociaux de base qui ne seraient que la juste contrepartie des impôts qu’elles payent.

Entre elles, des luttes intestines. Les abolitionnistes sont considérées comme des moralisatrices prohibitionnistes, les travailleuses du sexe comme des esclavagistes. Au delà de ces chamailleries de cour d’école, elles reconnaissent toutes que les prostituées doivent être protégées, car ce sont elles les premières victimes.

À suivre, Joyeux Bordel – deuxième partie.

 

Journaliste : Charlotte Espel
Images : Flore Viénot, David Nouguès, Antoine Conort
Montage : Christophe Moraw, Jules Dromigny.

Crédit photos : Julica da Costa
Crédit musique : « Lola Clem » – Germain Guyot

 

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Les commentaires (6)

  1. Magnifique docu, sans a priori, et tellement dans le vrai ! Merci beaucoup Charlotte de nous apporter une nouvelle forme de journalisme … On attend le deuxième volet avec impatiente ! Joyeux bordel à la télé libre et merci de nous offrir de telles pépites !

  2. C’est clair je suis d’accord avec Bertrand. Super!! J’ai trouvé très intéressant de leur donner la parole et de les entendre. Bravo Charlotte et toute l’équipe! J’attends la suite avec impatience!

  3. Super reportage, un point de vue que l’on voit peu souvent. Beaucoup de qualité dans la réalisation (le passage sur la dominatrice est absolument fantastique) et dans le contenu (notamment la voix off, excellente !). Bravo Charlotte !

  4. Excellentissime ! Bravo à la « stagiaire de choc », et à toute l’équipe de La Télé Libre pour continuer à nous offrir des contenus de qualité. A quand le second ?? On est impatients !

  5. Affronter les points de vue sans partie pris ni préjugés… voila ce qui manque au journalisme d’aujourd’hui et qui est totalement réussi ici ! Super joyeux bordel ! Vite, vite, on veut la suite !