QUI SONT LES FARC?

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Alors que la mort de onze députés colombiens, otages des FARC, vient d’être annoncée, on apprend ce matin qu’Ingrid Betancourt, ex-candidate écologiste aux élections présidentielles colombiennes, serait encore en vie. Tanya Canacoo, qui vient de terminer son stage à LaTéléLibre, nous propose un dossier sur les FARC, à l’aide de plusieurs vidéos qu’elle a déniché sur Internet, en langue espagnole. C’est un peu le regard d’une majorité de colombien sur le Farc que Tanya nous a préparé.
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ACTUALISATION DU 6/07/07: Des centaines de milliers de Colombiens sont décedu dans les rue de Bogota hier 5 juillet, pour demander aux FARC de libérer leur otages et se rendre aux autorités.

Colombie, 1948. L’assassinat d’Eliecer Gaitan marque le début des guérillas libérales et communistes. Cette période, sobrement appelée la Violencia, cause 300 000 morts et trace l’esquisse d’une histoire sanglante qui ne semble pas vouloir prendre fin.

En 1964, le Xè Congrès du Parti communiste colombien forme les FARC (Forces armées révolutionnaires de Colombie), devenus aujourd’hui la principale force rebelle du pays avec 17000 hommes. Les combattants sont en majorité des hommes, souvent mineurs, mais les femmes sont également présentes et leur effectif a augmenté durant les 20 dernières années. Elles représentent entre 30% et 35% des effectifs.
Depuis leur création les revendications de cette organisation, reconnue comme terroriste par les Etats-Unis et l’Union Européenne, ne sont pas restées inchangées.
Initialement, l’action des FARC avait pour cible principale la lutte des classes. Mais petit à petit le combat est devenu de moins en moins politique et leur pouvoir économique non négligeable est lié à des pratiques mafieuses. En effet, les guérilleros financent leurs opérations par des enlèvements, des rançons mais ils entretiennent également un lien étroit avec les trafiquants de drogue.

On s’intéresse évidemment beaucoup au sort de ces quelques 1600 otages (colombiens et étrangers), qui seraient séquestrés et traités comme des animaux. C’est ce qu’a raconté John Franck Pinchao, un otage qui a réussi à s’échapper. Dans cette déclaration de mai dernier, il dénonce les conditions dans lesquelles les FARC l’ont maintenu mais il annonce aussi qu’Ingrid Betancourt serait encore en vie, après plus de cinq années de détention.

Pour les colombiens, en plus d’être des trafiquants de drogue (narcotraficantes), les FARC sont surtout des assassins et de moins en moins des opposants politiques. Afin de sensibiliser la population, un spot publicitaire, trouvé sur youtube, d’une quarantaine de secondes a été tourné pour la liberté des otages en Colombie.

Ainsi des milliers de familles sont amputées d’un de leur membre: père, frère ou mari. Face à cette hécatombe, il n’y a qu’une solution: la fuite du pays. Bien sur, tout quitter là-bas pour tout recommencer ailleurs n’est pas une décision simple à prendre.
Voici Martha, qui raconte son triste sort: l’enlèvement de son père, la demande de rançon des FARC et malgré le règlement effectué, son assassinat. Elle dévoile les menaces et la pression que les guérilleros exerçaient sur sa famille même après l’exécution de son père.

On observe que la situation va en s’aggravant. En effet, le 28 juin un communiqué de l’agence Anncol annonce que onze des douze députés de l’Assemblée régionale d’El Valle, retenus en otage depuis 2002, ont été tué le 18 juin « pris dans un feu croisé ». Le seul survivant est le député Sigifredo Lòpez, absent du campement lors de l’attaque militaire. Les Farc dénoncent une attaque de l’armée contre les camps de détention. Le général Freddy Padilla, commandant des forces militaires, affirme n’avoir lancé aucune « opération militaire de libération ».
La famille Bétancourt s’est mobilisée et a demandé à l’Espagne, la Suisse et la France « d’agir fermement auprès du président Uribe pour éviter à tout prix de nouvelles opérations militaires qui mettent en danger la vie des otages », comme celle du 18 juin.
La France a tout de suite répondu que tout usage de la force pour libérer les otages colombiens devait « être absolument proscrit ».

Mardi 3 juillet 2007, les guérilleros des FARC ont diffusé une vidéo datant d’octobre 2006 montrant 7 personnes retenues prisonnières. Un des otages, William Dominguez, affirme qu’Ingrid Betancourt serait toujours vivante.
« Encourageant » selon Olivier Roubi, le porte-parole d’Astrid Betancourt, la soeur d’Ingrid, et Yolanda Pulecio, sa mère, « insuffisant » pour Lorenzo Delloye, le fils d’Ingrid, les réactions face à cette vidéo sont assez partagées.
Voici donc, un court extrait (40 secondes trouvées sur www.lemonde.fr, la vidéo initiale étant longue d’une heure et demi) du témoignage reçu il y a peu par deux médias : Holman Moris, correspondant de Radio France Internationale (RFI) et Al Jazeera en Colombie. Nous pouvons voir 4 des 7 otages, dont William Dominguez. En plus d’avoir été en contact avec Ingrid, il aurait également vu Clara Rojas, l’adjointe d’Ingrid Betancourt, et Emmanuel le jeune fils que Clara aurait eu avec un guérilleros.

Tanya Canacoo

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Les commentaires (11)

  1. Très bon travail de recherche et d’explication Tanya ! On voit ici que la relève à La Télé Libre est déjà là et est très efficace !

  2. rien a dire la perfection pour une premiere. Continue comme ça et tu iras loin.bon courage biz a+ a st cloud.dj marco de st genis.

  3. Trés bon article montrant bien la situation du pays et les véritables intentions des FARC. Excellent travail de recherche et d’explication !! Bravo pour cet article.

  4. Merci pour cet article très développé et qui me semble objectif. Une pensée pour les 1600 otages. Et également un soutient et encouragement à la Télélibre pour ces reportages excellents et le plus souvent neutre.

  5. Oui enfin… Ce n’est pas inintéressant mais ça ne ressemple pas à un travail exhaustif. Je n’ai vraiment pas l’impression, en lisant ceci, qu’un gros effort a été fait sur l’exhaustivité des sources. Ca ressemble à un best of de reportage des médias locaux. Problème, là bas comme ailleurs la neutralité des médias n’est pas.

    Concrètement, il serait intéressant de répondre à l’intitulé « Qui sont les Farcs » plutot que « Comment sont perçus les Farcs ». Moi j’aimerais savoir pourquoi leur nombre est croissant, si les farcs se perçoivent eux même comme une mafia, quelle est leur vision sur l’exploitation de la droque (la question étant, puisque la drogue donne le pouvoir, quelle est la concurrence, et quelle cause sert elle), etc.

    Enfin présenter les Farcs sans introduire un minimum le contexte (la Colombie, histoire récente, quels enjeux) ne va pas nous mener très loin. Notament savoir qui est au pouvoir, quel est la légitimité démocratique, et quelles sont les pratiques du pouvoir.

    Bref. Ceci n’est pas encore au niveau de la lecture de ceci :
    http://fr.wikipedia.org/wiki/FARC

    Cette version est pas mal, il faut voir en d’autres langues. La version EN est orientée en tous cas. La version espagole… est hors de mes capacités ;-)
    http://es.wikipedia.org/wiki/Fuerzas_Armadas_Revolucionarias_de_Colombia

  6. ouh les méchants communistes terroristes (et semble t il traficant de drogue par surcroit). mais pourquoi sont ils si méchants? pourriez vous nous donner quelques pistes chère journaliste?

  7. @ lejob

    Ils sont si méchants car ce qui était idéalisé dans les années 60 ne l’est plus aujourd’hui. Avant on estimait que la violence faisait partie de la révolte et maintenant on y croit plus de tout.

    @ tanyaa

    Je rappelle que les enlèvements ou autre pression sur les populations n’est pas une exclusivité des FARC, paramilitaire ET militaire l'(ont) employe largement
    dernière précision:
    l’action de la France et de Suisse a des conséquences extrèmement dramatique dans la mesure ou ils veulent négocier avec des « terroristes » et qu’ils multiplient de valeur d’échange d’Ingrid, laquelle, je le rappelle, est allé dans un lieu ou pas un colombiens, même « loco », ne serait allé.

  8. Pour répondre à la question « Pourquoi les FARC sont-elles si méchantes? », je pense qu’il conviendrait de donner davantage d’explications sur leur origine et l’escalade de la violence qu’a connue la Colombie tout au long du 20ème Siècle.
    L’histoire est tellement compliquée qu’il serait impossible d’en expliquer tous les tenants et les aboutissants en quelques lignes, d’autant plus que je ne prétends pas la connaître parfaitement moi non plus.
    Je vais néanmoins essayer d’apporter quelques précisions supplémentaires à cet article.

    Le système politique de la république de Colombie a toujours été dominé par 2 partis: le Parti conservateur (droite) et le Parti libéral (plus ou moins au centre).
    En 1948, le leader libéral gauchisant Jorge Eliécer Gaitán, jouissant d’un énorme soutien de la part des classes populaires et grand favori à la toute proche élection présidentielle, est assassiné à Bogota. La réaction du peuple de Bogota, accusant le gouvernement conservateur en place d’avoir commandité le meurtre, est immédiate: de terribles émeutes éclatent et la ville est ravagée. La répression policière est impitoyable et à la fin de la journée les émeutes ont cessé mais le bilan s’élève à plusieurs milliers de morts dans la seule ville de Bogota. Ce triste épisode est appellé le « Bogotazo ».

    Puis le mécontentement populaire gagne les campagnes et le Parti libéral prend les armes pour affronter le Parti conservateur au pouvoir. La Colombie est alors engagée dans une sanglante guerre civile, appellée plus tard « la Violencia » (la Violence), qui durera plus de 10 ans, fera plus de 300 000 morts et divisera profondément le pays.
    Pendant « la Violencia », parallèlement à la guérrilla libérale, naissent des mouvements guérilléros d’influence marxiste.

    Au début des anées 1960, la guerre civile n’en finissant pas, les 2 partis décident de s’entendre et parviennent à un accord de paix basé sur un système d’alternance au pouvoir des partis libéral et conservateur.
    Le nouveau gouvernement invite donc les guérillas marxistes à rendre les armes et à exprimer leurs idées par le biais de la démocratie. L’invitation est acceptée. Cependant les dirigeants gauchistes et syndicalistes se font tous systématiquement assassiner les uns après les autres.
    Les survivants s’enfuient dans la jungle avec leurs familles en 1964. Là ils forment une communauté paysanne vivant en autarcie, se déclarent indépendants de l’Etat colombien, et proclament la « République indépendante de Marquetalia ».
    La réponse du gouvernement colombien est immédiate: il envoie l’aviation de l’Armée nationale bombarder la zone. Le bilan est une nouvelle fois sanglant et le succès militaire de l’armée colombienne dans cette opération est indéniable.
    Les quelques « citoyens » de l’ex-« République de Marquetalia » ayant survécu aux bombardements se retrouvent dans le maquis et déclarent qu’ils ne feront plus jamais confiance à l’Etat colombien et qu’ils se retrouvaient contraints et forcés de tenter de le renverser par la force. C’est ainsi que sont nées les FARC (Forces Armées Révolutionnaires de Colombie) en 1964 avec à leur tête Manuel Marulanda.

    Ce rappel historique pourrait faire penser que mon intention est de présenter les FARC en victimes. Je pense effectivement que ceux qui les ont fondées, étaient bien des victimes d’un système ultra-répressif et corrompu.
    Ce système n’a jusqu’à aujourd’hui jamais cessé d’exister et les injustices et inégalités terribles dans la société colombienne ainsi que les scandales liés à la « para-politique », qui sont régulièrement dénoncés par les FARC, sont bien réèls.
    il est certain que cela ne suffit pas pour excuser les FARC de toutes les horreurs qu’ils ont commises et continuent de commettre.
    Les FARC sont en fait parvenues à utiliser les mêmes méthodes que leurs ennemis (police, armée et milices paramilitaires), c’est à dire le recours systématique à la terreur comme arme de guerre et au narcotrafic comme moyen de financement.
    Les exemples de la cruauté, de l’impitoyabilité et de la corruption des FARC ne manquent pas. Mais ceux de leurs ennemis sont hélas encore plus nombreux. Pour vérifier cela il suffit de chercher des infos sur le procès de certains chefs paramilitaires qui a lieu depuis plusieurs mois en Colombie et notamment les « confessions » de Mancuso.

    On peut donc dire que oui, les FARC sont affreusement méchantes, mais elles ne constituent qu’une pièce, et sans doute pas la pire, du sanglant puzzle qu’est le conflit colombien.

  9. Pourquoi les FARC sont un sujet à la mode? En raison de la surmédiatisation de l’affaire Betancourt.
    Sarkozy a obtenu la libération d’un haut gradé des FARC de la part du gouvernement colombien, dans le but d’obtenir en retour celle d’Ingrid Betancourt de la part des FARC.
    Doit-on considérer les FARC comme des belligérants ou comme de vulgaires terroristes? L’Union européenne, et donc la France, les considère officiellement comme des terroristes. Or, doit-on négocier avec des terroristes preneurs d’otages? On a auparavant toujours entendu dire que non car ce serait légitimer la prise d’otages et inciter les terroristes à recommencer.
    C’est donc un peu comme si Sarkozy lançait un message à tous les terroristes du monde: « Les otages français ont une bonne valeur puisque leur gouvernment est prêt à négocier leur libération et à faire d’importantes concessions, alors allez-y servez-vous! »
    Sarkozy a donc simplement porté atteinte à la sécurité des ressortissants français à l’étranger, et surtout dans les pays sensibles. Les raisons? Publicitaires bien sûr! Sarkozy a voulu surfer sur la vague de popularité qu’a sucitée Ingrid Betancourt en France, et qui a été largement relayée par les médias.