Un passé militant

« vous voulez des légumes ? c’est gratuit ! » C’est de cette manière originale que Julien Bayou cherche à interpeler les passants. Au passage, il glisse un tract et n’oublie pas de rappeler que le 1^er tour de l’élection se déroulera le 11 juin.

À 36 ans, l’élu au Conseil régional d’Ile de France est une figure bien connue du paysage politique français. Il s’est d’abord fait connaitre en tant que militant associatif en créant en 2005 génération précaire. Avec ce collectif et notamment grâce à des mobilisations dans lesquelles les participants sont masqués, il cherche à sensibiliser à la condition des stagiaires trop souvent sous-payés. Une mobilisation pas vaine, puisqu’elle débouchera sur une loi qui interdit les stages non payés de plus de 3 mois.

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« Mener la baston » à l’intérieur du système

En 2006, c’est avec Jeudi Noir qu’il attire les média autour de la question du mal-logement. Combat qu’il mènera par la suite en tant qu’élu au Conseil régional sur la liste EELV-Front de gauche en s’investissant dans la commission Logement. Pour lui, cette double casquette de militant et d’homme politique est une évidence. Il voit d’ailleurs son combat pour être élu comme un prolongement naturel de son engagement militant. En effet, se battre dans l’opinion publique pour mettre la lumière sur un problème de société et fournir des solutions, c’est le travail des associations. Mais il faut ensuite un élu pour se battre à l’intérieur du système politique, pour « mener la baston » et faire adopter des lois.

Cette médiatisation lui vaudra d’être classé par le Huffington Post comme l’une des dix révélations politiques de l’année 2016.

Après l’élection d’Emmanuel Macron, et la défaite historique du parti socialiste allié à EELV, Julien Bayou repart en campagne pour se faire élire à l’Assemblée nationale. S’il loue la nomination de Nicolas Hulot au Ministère de l’écologie, il reste méfiant quant à sa marge de manœuvre. Il en fait d’ailleurs un argument de campagne : selon lui, plus il y aura d’élus écologistes à l’Assemblée, plus il sera possible d’appuyer les mesures de l’ancien animateur télé.

Le « renouvellement » en question

Jeune visage de la classe politique, il se méfie de cette mode du renouvellement de la classe politique depuis l’élection présidentielle. S’il admet volontiers que cette aspiration est légitime, il veut remettre en perspective la notion de société civile mis en avant par le mouvement En Marche. Pour lui, des candidats que l’on présente comme « issus de la société civile » et qui ont fait leur cursus dans les multinationales n’ont rien de différents avec les élites en place depuis toujours. Opposé à Benjamin Griveaux, porte-parole d’Emmanuel Macron lors de la présidentielle, il sait qu’il aura fort à faire.

« être un élu militant devrait être un pléonasme. Un élu qui n’est pas militant, ça ne sert à rien », Julien Bayou

Pour cette élection, les réflexes de militant refont surface. Notamment pour aller à la rencontre des gens de manière différente. Il distribue des cornets de carottes faits avec ses tracts, il affiche son numéro de téléphone sur une pancarte « Allo Julien ? » pour se rendre accessible pour ses électeurs, il déambule avec son vélo électrique, charriant sa permanence mobile à travers le 10^ème arrondissement de Paris, ou il organise un festival une semaine avant le 1^er tour. Ce soir-là, après avoir distribué tous ses tracts et ses salades, il anime un café citoyen sur le thème « comment faire avancer l’écologie ces cinq prochaines années ». Il a invité pour l’occasion des responsables d’organisations, telles que Jean-François Julliard de Greenpeace, Flore Berlingen de Zero Waste France, ou Hélène Binet de La Ruche Qui Dit Oui.

Mais, est-il possible de rester militant quand on est élu ? Pour beaucoup, la réalité des institutions, le jeu politique, oblige à se conformer à une ligne, à faire des compromis. Pour Julien Bayou c’est une évidence : « être un élu militant devrait être un pléonasme. Un élu qui n’est pas militant, ça ne sert à rien ».

Reportage : Camille Saiseau
Montage : Mélanie Dusquene