SOURIEZ, VOS ENFANTS SONT FICHÉS

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Les élèves de CM2 de l’école Primaire de Monein dans le Béarn ont dû remplir dans le plus grand secret une évaluation de compétences comportant des questions sur leur nationalité et leur culture. Cette initiative du ministère de l’Education « remet en cause la protection des libertés » selon les syndicats.

« Tu es né en France ? »,  « Ta mère est Française ? »,  « Tu parles quelle langue à la maison ? »… Non, ces questions ne sont pas posées par un inspecteur de police à un délinquant mais par l’administration française aux élèves de CM2.

Et oui!

Le 22 mai dernier, les élèves de l’école élémentaire de Monein, dans le Béarn, ont eu la surprise de trouver au coin de leur table un dossier de 11 pages intitulé « Evaluation de fin d’études » avec dans le coin en haut à droite un mot étrange : expérimentation.
Au départ rien de bien méchant, les écoliers sont soumis à une petite évaluation de connaissance. Les deux premières parties portent sur la compréhension d’un texte. La troisième demande aux élèves de rédiger une petite rédaction… Une sorte de brevet des collèges avant l’heure, sauf que dans la quatrième et dernière partie,  il y a un hic.

En préambule, un petit texte explique aux élèves qu’ici, il n’y a pas de bonnes ou de mauvaises réponses. Et pour cause, les questions posées n’ont rien à voir avec les exercices précédents. Dans cette partie, les interrogations sont d’ordre privé. Au menu, des questions la nationalité de l’élève, de ses parents, sur la langue maternelle. Viennent ensuite des questionnaires concernant « Ce que je pense des devoirs à la maison ». Les jeunes écoliers doivent répondre à des questions telles que « à la maison j’ai vraiment l’impression de perdre mon temps » ou alors « je fais mes devoirs à la maison parce que j’aurais une mauvaise image de moi si je ne travaillais pas. » Un vrai petit interrogatoire.

Après avoir répondu consciencieusement à cette quatrième et dernière partie, les élèves remettent leur copie à leur instituteur. Et là, il y a encore un hic. Le professeur n’a en aucun cas le droit de corriger les copies, ni même de les consulter. Tels des agents spéciaux, ils remettent dans le plus grand secret les documents au ministère de l’Education.

la protection des libertés remise en cause

Scandalisés par la démarche, les enseignants ont prévenu les parents qui ont immédiatement informé l’inspecteur d’académie de leur mécontentement. La Fédération des Parents d’Elèves du Béarn et les principaux syndicats ont informé la presse locale. Joint au téléphone, les syndicats précisent que ce choix  «s’est avéré payant» puisque le ministère a demandé  «aux 79 autres écoles choisies pour cette expérimentation de ne pas faire remplir aux élèves la quatrième partie.»

Cependant, le ministère de l’éducation a tenu à préciser que cette note a pour but de détecter les lacunes des écoliers. L’inspection académique, qui n’a pas souhaité nous répondre, ne souhaite pas que des élèves ayant un niveau insuffisant passe en classe supérieure et accumule les lacunes d’années en années.

L’expérimentation rappelle quelque peu le projet « Base élèves » mis en place à la rentrée 2007 et très contesté. Un projet qui avait pour but de collecter au niveau national des dossiers personnalisés sur chaque élève âgé de 3 à 15 ans afin d’assurer un suivi du parcours et de la scolarité des élèves. En place dans 80 départements, ce projet avait à l’époque été vivement contesté par les principaux syndicats de l’éducation et les parents d’élèves pour manquement à la protection des libertés. Une pétition à l’initiative de la Ligue des droit de l’Homme avait récolté plusieurs dizaines de milliers de signatures.  Sous la pression, le ministère de l’Education avait supprimé du projet « Base élèves » toutes les mentions liés à la nationalité.

A suivre, donc.

Benoît Gauthier

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Les commentaires (6)

  1. cela fait de nouveau froid dans le dos : hortefeux, darcos , sarkozy, mais par quel genre de « sbires » sommes nous dirigés??? sur les 53%, combien voteraient encore pour cette bande du cac 40 bling bling et cie !!!

  2. Pas mal j’en ai peur… Avec la bande de sinistres séides qui sort du bois ces temps-ci, ces méthodes liberticides et fascistes risquent de devenir de plus en plus courantes. Restons vigilants !

  3. CONVENTION INTERNATIONALE
    DES DROITS DE L’ENFANT

    ONU : 20 novembre 1989

    Article 8
    1. Les États parties s’engagent à respecter le droit de l’enfant de préserver son identité, y compris sa nationalité, son nom et ses relations familiales, tels qu’ils sont reconnus par la loi, sans ingérence illégale.

    Article 16
    1. Nul enfant ne fera l’objet d’immixtions arbitraires ou illégales dans sa vie privée, sa famille, son domicile ou sa correspondance, ni d’atteintes illégales à son honneur et à sa réputation.
    2. L’enfant a droit à la protection de la loi contre de telles immixtions ou de telles atteintes.

  4. trop tard gwendal
    L’Education nationale envisage de généraliser, à la rentrée 2007, le logiciel « base élèves du premier degré », un logiciel d’aide à la gestion des élèves, au suivi des parcours scolaires et au pilotage académique et national.
    Cette base a reçu l’aval de la CNIL et il en existe un équivalent dans le second degré.
    Ce logiciel permet au directeur d’école, au moment de l’inscription de l’élève, de saisir un certain nombre de renseignements concernant l’enfant et sa famille.
    Outre les éléments d’état civil déjà consignés dans le document papier jusqu’à présent utilisé, comme la nationalité, sont demandés la date d’entrée en France de la famille et si celle-ci
    souhaite un enseignement de langue et culture d’origine (ELCO).
    En cours d’année, le directeur fait également figurer sur la fiche de l’élève des précisions sur lesquelles les parents n’ont pas prise: suivi de l’élève par le RA8ED, par un psychologue
    scolaire, décompte des absences…